samedi 13 février 2010

Année sacerdotale





Je viens d'ouvrir une chronique sur le site du journal LE MONDE (https://mail.google.com/mail/?account_id=paul.maire57@gmail.com#buzz), elle concerne l'"Année sacerdotale" initiée par le pape et qui n'est pas à mes yeux sans poser de problèmes. Pour ceux qui auraient du mal à y accéder je la reproduis ici.

Chronique sur le site du journal LE MONDE

Le 29 juin dernier sans consulter ses frères dans l'épiscopat, le Pape Benoît XVI ouvrait une année “ sacerdotale ”. Surprise dans le monde catho. Les uns se réjouissent, mais d'autres s'interrogent. En effet, ce lancement bénéficie du patronage de Jean-Marie Vianney, plus connu sous le vocable de “ Curé d'Ars ” dont on célèbre le 150e anniversaire de la mort. Loin de mettre en cause les mérites de ce saint prêtre, force est de reconnaître que son ministère aussi bien que sa spiritualité portent la marque d'une époque et d'un contexte social fort éloignés de la vie des prêtres d'aujourd'hui. Nommé en 1818 curé d'un misérable village des Dombes, talonné toute sa vie par la vision tragique du péché du monde et de sa propre indignité, tenté par moments de s'enfuir, il trouva dans cette épreuve de dénuement un chemin de sainteté et la consolation de voir les foules converger vers lui. Sa conception du prêtre porte l'empreinte de la Contre réforme qui réagissait contre les conceptions protestantes. Il suffit d'en citer ici quelques échantillons : “ Après Dieu le prêtre c'est tout… Si nous avions la foi, nous verrions Dieu caché dans le prêtre comme une lumière derrière la vitre… Le prêtre ne se comprendra bien que dans le ciel. Si on le comprenait sur terre, on mourrait, non de frayeur mais d'amour. " Une telle sacralisation du prêtre laisse dans l'ombre le baptême chrétien qui nous fait participer au sacerdoce du Christ. Les théologiens jugeront.

   Accepter ce patronage, même si nous trouvons la figure discutable, n'empêche pas de se poser des questions autrement importantes sur le déroulement de cette “ année sacerdotale ”. Les différentes initiatives qui répondent dans les diocèses à l'appel du Saint Père restent cantonnées aux pratiques traditionnelles en faveur de la pastorale des vocations : prière, adoration, relance de l'appel et collectes pour les séminaires. Les seules nouveautés résident dans les pèlerinages au pays du curé d'Ars et des attributions d'indulgences. Nulle part ne sont pris en compte les véritables besoins de l'Eglise concernant les ministères, comme si la crise du clergé se résumait à une baisse de recrutement. Personne n'a le courage d'évoquer et de débattre des modalités de l'appel, de la formation actuelle dans les séminaires, du statut du prêtre et de son rapport à la mission dans la société dans laquelle nous vivons, de l'accès à la prêtrise des hommes mariés sans parler de cette possibilité pour des femmes, voire d'une autre répartition des ministères entre les baptisés.

    Le débat est souvent écarté sous prétexte qu'à travers le monde, en particulier au sein des jeunes églises, les vocations affluent et que notre situation particulière est tout simplement due à la sécularisation et au matérialisme des sociétés occidentales. Comment ne pas percevoir que ces pays riches en vocations seront probablement, un jour ou l'autre, la mondialisation aidant, pénétrés par la modernité et la sécularisation qui les introduiront dans de nouveaux rapports à la religion. Faute de comprendre les véritables causes de la crise du clergé, il serait vain d'espérer un retour aux riches heures de la chrétienté qui a connu des temps fastes pour le clergé. Il serait bien dommage que cette année consacrée au prêtre empêche notre Eglise de relever le défi que la période actuelle présente. L'audace des premiers chrétiens stimulés par l'Esprit de Jésus-Christ leur a permis de se donner les apôtres dont elle avait besoin pour remplir sa mission. Le conservatisme et le repli, trop souvent confondus avec la Tradition, n'ont jamais porté le sceau de l'Esprit Saint. S’il faut prier, c’est avant tout pour que cet Esprit inspire les responsables de notre Eglise

Paul Maire

12 FÉVRIER 2010

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